Jules MASSENET, quelques éléments biographiques...

SON ENVIRONNEMENT FAMILIAL

Né en 1842 à La Terrasse, près de Saint-Étienne, du second mariage de son père, Jules Massenet est le dernier de douze enfants. Il bénéficiera d’un héritage génétique de l’Europe de l’est : un père alsacien avec des ascendants autrichiens, une mère avec du sang prussien, tous deux très rigoureux et exigeants. Sa famille déménage à Paris en 1848, lorsqu'il a six ans et sa mère lui donne ses premières leçons de piano.

Son père, Alexis Massenet, maître de forges, a introduit en France une technique industrielle pour affiner l’affûtage des faux. Sa mère, Adélaïde, excellente pianiste et peintre de talent, sera le seul professeur de piano de son fils jusqu’à son entrée au Conservatoire de Paris en 1853. C’est elle aussi qui lui donnera pour règle de vie cet acharnement au travail auquel il se pliera toute son existence. Jusqu’à sa mort, Jules Massenet se lèvera avant l’aube pour se consacrer à la composition.

La vie matérielle de la famille est incertaine. Sa mère donne des leçons de piano. Pendant quatre ans, il est timbalier au Théâtre lyrique. Il s'y familiarise avec le répertoire.

Après un 1er Prix de piano en 1859, il remporte le Premier Grand Prix de Rome en 1863 et passe deux années à la Villa Médicis. Pendant ce séjour, par l’intermédiaire de Franz Liszt, il rencontre celle qui deviendra son épouse, Louise-Constance de Gressy, qu’il épouse en 1866 ; de cette union, naîtra en 1868 une fille unique, Juliette.

Ci-dessous, de gauche à droite : Alexis Massenet, Adélaïde de Marancour, parents du compositeur, Louise-Constance de Gressy, son épouse, et Juliette Massenet, sa fille.

Alexis Massenet
Adélaïde de Marancour
Louise-Constance de Gressy
Juliette Massenet

SON PARCOURS PROFESSIONNEL

De retour à Paris en 1866, il subvient à ses besoins en donnant des cours de piano et pense publier des pièces de piano.

La rencontre avec Georges Hartmann qui sera son éditeur et son mentor, ainsi qu'une commande de l'Opéra-Comique, sont décisives pour sa carrière. En 1867, il crée sa première œuvre lyrique, La Grand’ Tante.

Il gagne rapidement en notoriété, et fait partie des jeunes compositeurs remarqués de Paris. Ses compositions sont publiées. Il s'engage dans la Garde Nationale pendant la Commune de Paris. Après la guerre de 1870 et deux opéras-comiques, le succès l’attend avec son premier oratorio, Marie-Magdeleine (1873). Puis un autre oratorio, Eve (1875) ; son premier grand opéra, Le Roi de Lahore, donné à Paris en 1877, lui apporte la consécration.

Il participe à la fondation de la Société Nationale de Musique. En 1876, Il reçoit la légion d'honneur à 36 ans (il en sera nommé Commandeur en 1899).

Massenet est nommé professeur de composition en 1878, en remplacement d'Ambroise Thomas qui en devient le directeur. Il aura comme élèves, dix-huit Grands Prix de Rome, sans oublier les jeunes compositeurs auxquels il prodiguait ses conseils - Maurice Ravel, Georges Enesco et Lili Boulanger furent du nombre. Reynaldo Hahn décrit son maître comme un homme épris de culture, sous toutes ses formes : « Il parlait de tout, de littérature, d’histoire et de peinture. Tout lui était bon pour illustrer ce qu’il voulait nous faire comprendre et son éloquence égalait sa sensibilité. Je n’oublierai jamais les heures passées avec lui au Musée du Louvre… ». Son enseignement était dispensé avec tact, prenant grand soin de donner confiance en soi à l’élève. Cette même année 1878, Massenet entre à l'Académie des Beaux arts, au siège de François Bazin, qui l'avait renvoyé de sa classe au Conservatoire vingt-cinq ans plus tôt, au motif de "hardiesse en harmonie" !

En 1899, Massenet rachète au peintre Etienne Berne-Bellecour le château d’Égreville, au sud de Fontainebleau. Dans les mois qui suivent, il y achève un oratorio monumental, La Terre Promise, et y compose un « miracle lyrique », Le Jongleur de Notre-Dame.

Entre 1900 et 1912, Massenet est régulièrement invité par le Prince Albert Ier à Monte Carlo, où seront créés Le Jongleur de Notre-Dame, Chérubin, Thérèse, Don Quichotte et Roma.

Après l’honorable succès d’Ariane à l’Opéra de Paris en 1906, Massenet y subit en 1909 le seul échec cuisant de sa carrière avec Bacchus.

En 1912, il meurt à Paris, à l’âge de soixante-dix ans, d'un cancer digestif qui le ronge depuis plusieurs années. Conformément à sa volonté, il est inhumé au cimetière d’Égreville. 

Ci-dessous, de gauche à droite : Massenet enfant (peint par Paul Cavaillé), adolescent, en 1861, en 1863, en 1877 (après un accident de voiture) et en 1878.

Massenet en 1851
Massenet adolescent
Massenet en 1861
Massenet en 1863
Massenet en 1877
Massenet en 1878

RELATIONS ET PERSONNALITÉ

Il entretient les meilleurs termes avec ses éditeurs et dans le milieu musical, Georges Bizet, dédicataire des Scènes Hongroises, (pour ses obsèques, Massenet composera un Lamento), Camille Saint-Saëns ; des compositeurs étrangers, Johannes Brahms, Giacomo Puccini, Engelbert Humperdinck, Piotr Illich Tchaïkovski et d’autres... Il restera fidèle envers ses aînés, Hector Berlioz, Charles Gounod et ses maîtres, parmi lesquels Ambroise Thomas, à qui il témoignera une immense reconnaissance et une affection quasi filiale jusqu’au décès de celui-ci.

Il entretiendra une amitié permanente avec de nombreux artistes :

Avec les peintres William Bouguereau, Félicien Rops, Pierre Puvis de Chavanne, Lucien Lévy-Dhurmer, et le portraitiste Georges Clairin, humoriste sans pareil qui deviendra le professeur de la fille du compositeur, Juliette ;

Avec le graveur Jules-Clément Chaplain qu’il a connu à Rome, auteur d’un célèbre dessin représentant Massenet dans la campagne romaine. Leur amitié durera jusqu’au décès de Chaplain en 1909.

Il y aussi des sculpteurs : Alexandre Falguière, Henri Chapu, Pierre-Félix Fix-Masseau, Jean-Désiré Ringel d’Illzach ; et des architectes tels qu’Eugène Viollet-Le-Duc et surtout Charles Garnier à qui l’on doit les opéras de Paris et de Monte-Carlo.

Parmi ses amis, nous trouvons également des écrivains comme Anatole France, l’auteur de Thaïs et Victor Hugo dont certains poèmes se retrouvent au nombre de ses mélodies (Massenet fut longtemps tenté d’écrire un opéra tiré de Notre-Dame de Paris) ; Juliette Massenet entretiendra une amitié durable avec les petits-enfants d’Hugo, Georges et Jeanne.

Surtout, n’oublions pas le plus proche d’entre eux, Alphonse Daudet, l’auteur des Lettres de mon moulin, chez qui Massenet rencontre Marie Delna, alors âgée de 18 ans, créatrice du rôle de Charlotte de Werther pour la reprise à Paris en 1893. Le roman, largement autobiographique de Daudet, Sapho, écrit en 1884 (année de la création de Manon), d’abord porté à la scène théâtrale, sera adapté sur un livret d’Henri Cain pour l’Opéra-Comique et créé en 1897. Cet ouvrage « naturaliste » est actuellement injustement absent de nos scènes lyriques.

Retenons aussi de nombreux poètes, qui inspireront ses mélodies… des auteurs dramatiques : Jean Richepin, Victorien Sardou…ses librettistes : Henri Meilhac, Louis Gallet, Henri Cain…

D’abord souvent jovial, prompt à l’humour, bon enfant ou acerbe, Massenet est en réalité un anxieux, prompt au découragement, parfois mélancolique.

Dans ses ouvrages lyriques, les sujets légers, à l’issue heureuse, l’inspirent mais ils sont peu nombreux : au début de sa carrière, La Grand-Tante (1867), Le Portrait de Manon (1894), Cendrillon (1899), Grisélidis (1901), Chérubin (1905) et, à la fin de sa vie, l’ouvrage posthume inspiré librement de Rabelais, Panurge.
Pour le reste, c’est l’omniprésence d’un thème dramatique : la rupture dans Sapho, la folie dans La Navarraise, et une issue fatale dans tous les ouvrages, d’Hérodiade à Cléopâtre (seule Esclarmonde échappe à la règle).

Massenet se livre peu sur ses œuvres dans sa correspondance familiale – celle qu’il entretient avec ses éditeurs ou ses librettistes nous renseigne davantage – mais elle jalonne des dates et des voyages. Par exemple, son voyage en Hollande « sur les pas de l’abbé Prévost » alors qu’il composait Manon ; les répétitions de Werther à Vienne… Le temps qu’il fait est également souvent porté en marge de ses manuscrits musicaux ainsi que son humeur : « Seul….Triste… ».

Impulsif, coléreux à ses heures, il s’en faut de peu qu’il ne se batte en duel avec le célèbre baryton Lassalle qui avait eu l’imprudence, pendant les répétitions, de critiquer l’interprète du premier rôle féminin dans l’opéra Le Mage.

Certains lui prêtent une vie amoureuse mouvementée… mais il faut bien dire qu’à cet égard, les preuves manquent. Massenet est sincèrement épris de son épouse, Louise-Constance, mais dès la naissance de leur fille en 1868, le couple s’étiole. Jusqu’à sa mort, le compositeur se désolera que celle qui ira jusqu’à surnommer « l’éternelle absente » passe des mois entiers loin de lui, de station balnéaire en ville thermale, sans se préoccuper particulièrement de sa musique. Pourtant, moins d’un an avant sa mort, il lui écrit : « Sais-tu que le 8 octobre prochain, il y aura 45 ans que nous sommes unis et… 46 que je t’aime ? ».

Aucun soupçon de liaison ne semble avoir pesé sur les rapports quasi professoraux entre Massenet et ses premières égéries féminines, Marie Heilbronn, Sibyl Sanderson et dans une moindre mesure, un peu plus tard, la fougueuse Emma Calvé. Sa relation, dans les dix dernières années de sa vie, avec Lucy Arbell, née Georgette Wallace, a en revanche fait couler beaucoup d’encre et de salive, probablement bien à tort.

La musique de Massenet, tant par sa quantité que sa qualité, témoigne du travail acharné et de l’énergie déployée par le compositeur, ce qui ne manque pas de questionner rationnellement la temporalité de quelconques aventures.

Quoiqu’il en soit, l’œuvre de Massenet est une de celles où l’émotion du créateur s’exprime avec force sincérité, laissant croire - il est faux de le penser – à une apparente facilité harmonique et mélodique. C’est ce qui fait son succès et fait aussi, encore aujourd’hui, l’objet de critiques. Jules Massenet fut un fin pédagogue, grand amateur d’Art, et reste quoi qu’en pensent les esprits chagrins l’un de nos compositeurs les plus éclectiques et les plus talentueux.

Ci-dessous, de gauche à droite : Massenet vers 1880  (2 photographies), en 1881, vers 1890, vers 1910 et fin 1911.

Massenet c. 1880
Massenet c. 1880
Massenet en 1881
Massenet c. 1890
Massenet c. 1910
Massenet en 1911

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Date de dernière mise à jour : 08/09/2025